L’ATELIER « Les enfants dans les affrontements religieux »

« Les enfants dans les affrontements religieux de la première modernité »
et le corpus de textes des réformateurs réunis autour de G. Farel

Projets dirigé par Nathalie Szczech

Comment et pourquoi différents acteurs de la transmission du savoir œuvrant au sein de réseaux savants ou dans une relation didactique (maître-élève, prédicateur-fidèles, etc.) ont-ils pu s’approprier, transformer, mobiliser des formes, des discours pédagogiques ou des contenus de savoir ? Étudier la construction, la circulation et la mobilisation des savoirs en France à l’automne de la Renaissance, ce n’est en effet pas seulement analyser la manière dont la France s’approprie des modèles étrangers ou développe ses propres formes, mais aussi examiner la manière dont les savoirs sont utilisés en période trouble et de crise. Les années 1570 entraînent à leur suite un sérieux nouveau, contraignent à abandonner certaines formes, à en inventer d’autres, en même temps que se développe un discours politique et juridique nouveau sur le rôle de l’éducation comme facteur de paix et d’unité. Cette partie du projet « Hybridations savantes » sera explorée par l’Atelier de travail sur Les enfants dans les affrontements religieux de la première modernité, et la numérisation d’un corpus de texte des premiers Réformateurs autour de Guillaume Farel.

1. Ateliers de recherches sur « Les enfants dans les affrontements religieux de la première modernité »

Quatre séances d’atelier de recherche ont déjà été organisées au Musée d’Aquitaine au premier semestre 2019. Elles ont été cofinancées par le CEMMC, le Centre Montaigne et le Musée d’Aquitaine et sont intégrées à l’axe « Circulations et mobilisations des savoirs » de l’équipe-projet. Il s’agit d’y interroger la question de l’enfance en situation de conflits religieux, thème qui n’a été que peu abordé dans les recherches consacrées à la première modernité et qui permet d’explorer, par une autre voie, le champ des conflits religieux en continuel renouvellement depuis les années 1990. La réflexion prendra une dimension européenne et s’étendra sur les XVIe et XVIIe siècle, marqués par les affrontements religieux. Tout type d’affrontement est soumis à l’étude (conflits armés dans toutes leurs modalités, guerres des mots et des images, affrontements symboliques, violences judiciaires, etc.), de manière à ouvrir au maximum le champ d’étude. Plusieurs axes de réflexion sont suivis par les chercheurs impliqués dans cet axe de recherche : les enfants victimes des affrontements religieux ; les transformations que les affrontements religieux font naître dans les structures au sein des familles, des institutions d’enseignement ou d’autres structures qui reçoivent les enfants à l’époque moderne ; la mobilisation des enfants dans les affrontements religieux, ses instruments, ses modalités ; la mémoire des affrontements religieux vécus dans l’enfance. En lien avec les thèmes de recherche proposés par l’équipe-projet, on travaillera tout particulièrement la question de la transmission des savoirs aux enfants et de sa transformation en situation de conflit religieux et le thème de la mobilisation des savoirs au service d’un camp, avec l’objectif de comprendre comment, par qui et dans quelle mesure les enfants ont pu être embrigadés dans les affrontements religieux de la première modernité.

Les ateliers de l’année 2019 sont envisagés comme de véritables séances de réflexion collective et serviront à mettre au jour des problématiques porteuses sur la question de la mobilisation des enfants dans les affrontements religieux de la première modernité, qui est un champ de recherche à défricher. Ces séances font intervenir un ou deux chercheurs, qui proposeront un travail sur les sources mobilisables pour réfléchir à la place des enfants dans les affrontements religieux et soumettront à la discussion des cas et des axes de travail. Des compte rendus de séances seront publiés en ligne sur un carnet Hypothèses, de manière à ce que les chercheurs intéressés puissent suivre l’avancée de nos travaux.

Le programme des premières séances d’atelier est le suivant :
30 janvier 2019, Jérémie Foa (Université d’Aix-Marseille – UMR Telemme): « Les enfants du massacre. La place des enfants dans les violences de la Saint-Barthélemy (1572) ».
20 février 2019, Florence Buttay (Université Bordeaux Montaigne, CEMMC) et Charlotte Girout (UBM, SPH): « Éduquer les enfants dans la France des guerres de Religion ».
20 mars 2019 : David El Kenz (Université de Bourgogne, Centre Georges Chevrier): « Les enfants martyrs au temps des guerres de Religion ».
10 avril 2019 : Nathalie Szczech (Université Bordeaux Montaigne, CEMMC): « Apprendre à lire, apprendre à croire.Les manuels d’instruction réformés et la mobilisation des enfants dans les affrontements religieux du XVIe siècle ».

Quatre nouvelles séances d’atelier sont prévues au second semestre 2019, avec l’objectif d’ouvrir l’espace et la période à l’étude. Après une première session consacrée au cas de la France des guerres de Religion, nous souhaitons que cette seconde session ouvre la réflexion à l’échelle européenne et permette des comparaisons. Notre objectif est aussi de prendre en considération les affrontements religieux du XVIIe siècle (guerre de Trente Ans, révocation de l’édit de Nantes et ses conséquences par exemple), pour comprendre si les guerres de Religion ont fait mémoire et quelles évolutions peuvent être tracées sur deux siècles. Le programme de la seconde session d’ateliers est actuellement en préparation : nous aimerions intégrer à notre programme des spécialistes de l’histoire religieuse du Saint-Empire, des historiens travaillant sur les minorités morisques ou marranes, des chercheurs travaillant sur les affrontements religieux dans l’Angleterre des XVIe-XVIIe siècles ou des historiens dont les recherches portent sur les espaces coloniaux et leur conquête spirituelle.

Deuxième série d’ateliers :
A l’heure où l’on s’interroge sur l’engagement des jeunes dans les violences religieuses contemporaines, ces rencontres se proposent d’éclairer les modalités d’implication des enfants dans les affrontements religieux qui ont déchiré l’Europe entre 1520 et 1640 environ. La dimension religieuse de ces conflits leur a conféré des traits spécifiques : conquête des âmes, développement de moyens de contrôle social, fabrication d’identités collectives opposées… Dans ce contexte, les enfants sont à la fois acteurs de la violence (soldats, massacreurs, iconoclastes), victimes (martyrs, convertis de force etc.) mais aussi militants : à travers l’éducation, le catéchisme, ou encore les chansons, les moyens de les mobiliser ont été multiples et relativement efficaces.
Cette deuxième série de conférences se propose d’élargir la réflexion à la fois dans l’espace, en considérant les affrontements religieux dans leur dimension européenne, mais aussi dans le temps, en ouvrant l’étude au premier XVIIe siècle pour s’interroger sur la mémoire que gardent de leur enfance ceux qui ont grandi au milieu des conflits religieux.

Les séances ont lieu à 18h, au Musée d’Aquitaine :

Mercredi 6 novembre 2019: Jean-Pierre Van Elslande (Université de Neuchâtel), « Enfances vécues, enfances racontées : histoire et littérature (XVIe-XVIIe siècles) ».

Mercredi 13 novembre 2019: Yves Krumenacker (Université Jean Moulin Lyon III), « Protestantisme et éducation militante dans la France des affrontements religieux (XVIe-XVIIe siècles) ».

Mercredi 11 décembre 2019: Isabelle Poutrin (Université de Reims Champagne Ardenne), « Les enfants des morisques: débats et pratiques (Espagne, 1491-1614) ». de la première modernité », automne 2019.

– Mercredi 22 janvier 2020: Frédéric Hitzel (CNRS): « Des enfances convoitées. Conversions de jeunes entre mondecatholique et monde musulman, XVIe-XVIIIe siècles. »

2. La base de données

Constitution d’une base de données sur les premiers réformateurs francophones réunis autour de Guillaume Farel dans les années 1520-1540 et encodage de leurs publications polémiques imprimées (Nathalie Szczech).
Pour comprendre la manière dont les informations et savoirs circulent à l’échelle européennes entre réformateurs francophones et mieux saisir la manière dont ces derniers se constituent en réseau, Nathalie Szczech travaille à l’établissement d’une base de données réunissant toutes les informations que les sources (notamment la correspondance) permettent de réunir sur ces acteurs de la Réforme en territoires francophones : leurs origines sociales et géographiques, leur formation, les fonctions qu’ils ont pu occuper, leurs mobilités à l’échelle régionale, nationale et internationale, leurs productions (manuscrites ou imprimées). Cette base de données sera réalisée en partenariat avec le Pôle histoire numérique du Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (PHN-LARHRA) et hébergée dans la Base d’hébergement de projet (BHP) du programme symogih.org (http://symogih.org/). Les données recueillies au cours de cette recherche seront ainsi accessibles à d’autres chercheurs, selon le principe FAIR (Findable, Accessible, Interoperable, Reusable).

Le corpus imprimé de ces réformateurs (28 petits traités polémiques) sera encodé selon le format XML de manière à pouvoir croiser plus facilement les textes et à mener une étude de la circulation des formes et des idées d’une publication à l’autre